2011 : La Star Actu (ou l’année des vagues médiatiques)
Fin 2010–début 2011, des manifestations éclatent en Tunisie et Ben Ali finit par chuter (ou plutôt migrer, vers l’Arabie Saoudite). J’ai à peine le temps de comprendre ce qui se passe que pouf c’est éclipsé par l’Egypte et la chute de Moubarak (là, il lui aura fallu un peu plus de temps). Aussi après avoir jeté « La Tunisie pour les nuls », je m’attèle à lire de fond en comble « L’Egype pour les nuls » (car j’essaye de comprendre ce qui se passe dans le monde, mon écran de télévision faisant figure de véritable boîte noire pour mes méninges).
J’ai toutefois à peine commencé le prologue de « L’Egype pour les nuls » que je dois déjà le jeter pour m’acheter « La Côte d’Ivoire pour les nuls ». Car entre-temps une guerre civile a éclaté entre pro-Gbagbo et pro-Ouattara, les troupes de ce dernier étant aux portes d’Abidjan. Autant dire que Ben Ali et Moubarak sont déjà éclipsés des unes des journaux et des JT. Je change donc de livre (mais pas de continent) et me mets à lire « La Côte d’Ivoire pour les nuls » (au moment même où Gbagbo est arrêté, soit juste avant que Ouattara soit nommé président).
Bien sûr, ça ne dure pas. Car pouf une guerre civile éclate en Lybie. De nouveau, je dois changer de livre (exit donc « La Côte d’Ivoire pour les nuls », remplacé instantanément par « La Lybie pour les nuls »). Je n’ai cette fois-ci cependant pas le temps de commencer à lire le prologue qu’un tsunami ravage le Japon et qu’un risque d’explosion d’une centrale nucléaire surgit. Pas le choix, je dois encore une fois changer mon fusil d’épaule (ou plutôt mon livre de main) et me mettre au diapason avec les unes des journaux et les JT.
Car mine de rien y savent y faire pour nous tenir en haleine et nous donner l’impression qu’on vit un truc de dingue en direct (du coup mon ragout aux lentilles est raté, j’ai tout laissé sur le feu au cas où il aurait fallu que je me réfugie illico presto dans un abri antiatomique, parce qu’ils en ont bien prévu un qui recueillerait tout le monde, rassurez-moi…). Bon bref, mon ragout aux lentilles est raté. Mais pas autant que les tentatives pour refroidir le réacteur de la centrale de Fukushima. Et dire qu’il y en a qui regardent Plus belle la vie pour être tenus en haleine…
« Le Japon pour les nuls » dans ma main gauche et « Le nucléaire pour les nuls » dans ma main droite, je suis fermement résolu à tenter de percer les mystères de ce qui se passe à l’écran quand une nouvelle fois je dois me résigner à changer de livre. Car maintenant c’est Ben laden qu’ils ont eu (en version originale : « We’ve got him »). Je crois que je vais finir par avoir une crampe aux mains à force de changer sans cesse de manuel (mais au moins je ne risque par un claquage oculaire, n’ayant à chaque fois que le temps de lire le titre de l’ouvrage). Je jette donc « Le Japon pour les nuls » et « Le nucléaire pour les nuls » pour les remplacer par « Le Pakistan pour les nuls » et « Ben laden pour les nuls ». Bien entendu, ça ne dure pas. Pas à cause des morts de soldats en Afghanistan ni des licenciements économiques (ça dure à peine deux trois jours dans les unes, tout comme un film reste désormais à peine deux trois semaines à l’affiche), mais tout simplement parce que DSK vient d’être arrêté pour tentative de viol. Là, c’est un véritable climax médiatique, une espèce d’orgasme cathodique planétaire. Même à Ouambagoudougou, le seul village africain où la télé n’existait pas, ils viennent de se cotiser pour en acheter une (rien que pour suivre les pérégrinations du directeur du FMI et de la femme de ménage du Sofitel de New York). Là, c’est du bon, encore mieux que le pot belge, un véritable shoot d’audimat. C’est glauque, c’est haut placé, c’est bizarre et des gens passent (oui, parce qu’il y en a des gens qui passent devant le tribunal où aura lieu le procès : journalistes, anonymes, ligue des droits de la femme, politiques...). Cette fois-ci c’est bon, j’ai le temps de lire le prologue du manuel « Le sexe et la politique pour les nuls ». J’ai même le temps de lire le premier chapitre, parce que le procès DSK c’est du même acabit que la mort de Mikael Jackson deux ans auparavant, de l’info XXXXL qui prend toute la place de l’écran et même des discussions.
Bien lové dans mon rocking-chair prêt à comprendre tous les soubresauts des scandales liés au sexe, je suis de nouveau pris de cours par l’actualité. Car voilà qu’un norvégien tout propre sur lui vient de faire sauter une bombe et tiraille tout azimut sur une île qui n’a rien de Woodstock (plutôt Guadalcanal quand on voit le nombre de victimes). Je ne trouve pas « Les psychopathes pour les nuls », et du coup j’en suis réduit à acheter « La Norvège pour les nuls ». Mais ça ne m’aide pas, on dirait un ouvrage dédié aux Bisounours (à croire que depuis les vikings, la Norvège est devenue l’île aux enfants).
Bref, plus j’essaye de comprendre ce qui se passe dans le monde, moins ça devient limpide. Surtout quand intervient le scandale des écoutes téléphoniques en Grande Bretagne (un journal qui aurait mis tout le monde sur écoute). C’est ZE sujet de l’actu, mais au fond je sais que ça ne durera pas, et bingo ça ne dure pas. Parce que Tristane Bardon décide de porter plainte contre DSK et puis Nafissatou Diallo s’est enfin exprimée devant les caméras (ou alors ça s’est passé c’était avant le scandale des écoutes téléphoniques, enfin bon quitte à ne rien comprendre, autant en plus se perdre dans les dates, ça rajoute du piment au schmilblick ou plutôt de la confusion, lui qui n’en demandait pas tant). Là, par contre, je n’achète aucun manuel, parce que je sais que ça ne durera qu’à peine deux trois jours (je deviens un expert de l’actu à force).
Bien vu parce qu’il y a les championnats du monde de natation (les Français à en croire les journalistes sont les devenus de vrais cadors, derrière quand même les Etats-Unis, la Chine, le Zimbabwe, la Grèce, le Lichtenstein…), la reprise du championnat de France (avec les millions injectés du Qatar dans le PSG pour acheter notamment Pastore, qui ça ?) et surtout l’info de l’année : le mauvais temps de l’été…
Là, c’est la cata. Vraiment, rien ne va plus. Obligés de bronzer sous les lampes les vacanciers ! Un véritable scandale ! Pire que le Médiator… D’ailleurs, ça passe avant les deux françaises tuées en Argentine dans le JT. Moi, par contre, ça passe après et j’achète « L’Argentine pour les nuls » pour comprendre. Mais ça ne m’aide en pas, tout comme « La Norvège pour les nuls » ne m’a pas aidé à comprendre Anders Behring Breivik (le tueur d’Oslo), et que « La France pour les nuls » ne m’a pas aidé à comprendre Dupont de Ligonnès – toujours introuvable - ou la mort d’Anne Caudal, cette femme enceinte retrouvé calcinée). Enfin bon, je ne vais pas tarder à ne plus rien comprendre à ce qui m’entoure. Surtout quand intervient la partie économique…
J’ai beau acheter la triple armada « L’économie pour les nuls », « L’économie pour les très nuls » et « L’économie pour les over nuls » (qui est-ce qui a inventé ça, l’économie ? Et est-ce qu’on était obligé de mettre autant de jargons ?), c’est pire que de lire un bouquin de physique quantique sous l’eau en apnée avec une gastro et après avoir fait cinq nuits blanches d’affilée. Parce qu’entre la crise grecque, les risques de défaut de paiement des Etats-Unis (sans parler de l’Espagne ou de l’Italie), les atermoiements du congrès et du sénat américains, la dégradation de la note américaine par Standard & Poor’s (c’est qui celui-là, un instit ?), la chute des bourses mondiales et des Jean Passédépamure (faudra me le présenter un jour, celui-là), je suis en pleine rupture d’anévrisme.
Heureusement (enfin bon, pour la compréhension j’entends) arrivent les émeutes en Angleterre : pillages, incendies, jets de projectiles… Enfin un sujet facile à identifier. Mais pas forcément. D’une part parce qu’on n’est pas en France (tiens, y’aurait donc pas que chez nous qu’y aurait des émeutes dans les banlieues), et d’autre part parce que c’est en Angleterre, land of gentlemen, courtoisie et des je vous en prie, isn’t it ? Alors oui, là je suis tout ébahi, tout perplexe et décontenancé… Et encore, on n’en est qu’à la moitié de l’année… Et encore je n’ai pas parlé de la Syrie, de Berlusconi, des primaires socialistes, de la famine au Soudan et au Kenya, de la dernière d’Harry Potter au cinéma, des accidents ferroviaires (dont celui du train à grande vitesse en Chine), des incidents ayant éclaté à Vancouver après la défaite de l'équipe de hockey locale en finale de la Coupe Stanley, des crashs d’avion (dont le vol Rio-Paris), des braquages de fourgons et autres banques… Alors plus belle la vie ? Tout dépendra des épisodes des six prochains mois. Car comment ne pas penser que l’actualité soit dictée par Hollywood quand on entend tout ça ?
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